Certes la Bretagne avait été un État extrêmement prospère aux XIVe et XVe siècles mais en un temps record sous le règne du très dépensier duc François II et dû à la nécessité de défendre le duché face aux menaces françaises, le duché avait accumulé une dette colossale,
Certes la Bretagne avait été un État extrêmement prospère aux XIVe et XVe siècles mais en un temps record, sous le règne du très dépensier duc François II, et dû à la nécessité de défendre le duché face aux menaces françaises, le duché avait accumulé une dette colossale, plus de 620 000 écus-couronnes d'or (1) envers le royaume d'Angleterre seulement.
L'Angleterre avait toujours été le garant de l'indépendance du duché de Bretagne, en 1492 le roi de France met fin à cette vieille alliance en remboursant la dette bretonne et payant à l'Angleterre une somme équivalente à la moitié de son budget !
Cette dette envers l'Angleterre sera épongée par le Roi de France Charles VIII lors d'un traité avec Henry VII Tudor en 1492 , le
traité d'Étaples. La dette du duché de Bretagne envers le royaume d'Espagne est aussi importante : entre 200 000 et 300 000 écus . Charles VIII donnera la Sardaigne et le Roussillon à l'Espagne pour rembourser la dette bretonne en plus des 300 000 écus pour avoir la
paix .
Une politique fiscale désastreuse
Le budget du duché de Bretagne était d'environ 400 000 livres bretonnes (487 000 livres tournois en monnaie française). Le budget du royaume de France est sept fois plus, soit 3 300 000 livres tournois. (2).
François II et ses trésoriers mènent une politique financière désastreuse surtout après l'élimination du trésorier Pierre Landais (1481-1485) victime d'un coup d'État de la part des nobles favorables au camp français. On indispose aussi les bourgeois et les commerçants de Nantes, Saint-Malo, Vitré et Quimper en dévaluant la livre bretonne en 1487, 1488, 1489 et 1490 (2). Les dévaluations ne font aussi qu'accentuer la dette souveraine bretonne. Le duché opère aussi des emprunts forcés : 207 000 livres bretonnes en 1488. Personne n'est content de ce chaos. La banqueroute menace. Le duc, sa cour, et la chancellerie, continuent un train de vie scandaleux engouffrant la moitié du budget de l'État.
Les nobles du camp français lèvent aussi des impôts. Ainsi le vicomte Jean de Rohan, qui se proclame Duc de Bretagne, veut imposer une taxe de 6 livres aux paysans de ses terres. Toute la Cornouaille se soulève de 1488 à 1490. Les châteaux du vicomte sont brulés. L'ordre est rétabli par des troupes anglaises qui sauvent Quimper de ces nouveaux Bonnets rouges.
Éponger la dette d'une manière ou d'une autre
Un pays endetté n'est plus un pays indépendant. On l'a vu avec la Grèce récemment. Rembourser cette dette souveraine bretonne incombait à tous les ordres : la noblesse, la bourgeoisie et le bon peuple. Les nobles bretons, déjà en lutte contre le renforcement du pouvoir ducal sous François II, ont commencé à chercher une solution pour ne pas avoir à rembourser cette dette. Trois solutions s'offraient alors pour éviter cette saignée : incorporer le Saint-Empire germanique comme le tentera la duchesse Anne par mariage avec l'héritier de l'Empire, incorporer le Royaume d'Angleterre, et Henry Tudor était prêt - offrant même le passage en Angleterre à Anne de Bretagne assiégée dans Rennes ; ou rejoindre le royaume de France. La dernière solution est apparue la plus facile d'autant plus que la noblesse avait aussi des terres et des pensions dans le royaume voisin. Le duché avait la première marine d'Europe. Il pouvait très bien tenir tête aux armées de Charles VIII même après la désastreuse bataille de Saint-Aubin du Cormier. D'ailleurs l'Angleterre le prouvera un siècle plus tard en neutralisant l'Invincible Armada de Philippe II d'Espagne grâce à sa supériorité sur mer. C'est la volonté d'indépendance qui fit défaut. Effacer la dette était devenu plus important pour les élites et arrêter la guerre, les greffes (corvées militaires) et les pillages étaient devenus le plus grand désir du peuple.
(1) selon le spécialiste de la Numismatique, Daniel Cariou, il s'agit d'écus or et non pas pas de couronnes comme l'indique wikipédia.
(2) Toute l'Histoire de Bretagne p. 182. Édition Skoll Vreizh
Modifié le 9 juillet 2016
Commentaires (9)
D'une part il avait été très dur avec Chauvin ,il était opportuniste ,autoritaire ,et il était jalousé d'autant qu'il n'appartenait pas à l'ordre de la noblesse, mais à la bourgeoisie commerçante , dans cette logique je pense dans ce sens que 's'il avait été là en 1789 ,il aurait été un précurseur de la révolution dans la ligne de la Chalotais ,et surtout l'homme de la situation pour la Bretagne .Il était loin en avance par rapport à son temps vu qu'il avait une conception moderne de l'état en rupture la politique et l'attitude de la noblesse voir même du pouvoir ducal .S'il n'avait pas été tué ,il aurait assis les fondamentaux de l'indépendance de la Bretagne pour très longtemps ,
Mais comme à chaque fois il doit y avoir une somme de vérités, et celle-ci n'est probablement qu'une facette.
Car le Royaume de France était autre chose qu'un "bon samaritain" qui remboursa les dettes de la pauvre Bretagne.
Au 16ème siècle, nous étions déjà à 1000 ans de conflits réguliers avec les Francs/Français.
Sait-on pourquoi François II dépensa autant d'argent?
Folie d'un personnage, besoin militaire face à l'agression française ou un peu des deux?
Rappelons nous que la France et la Grande-Bretagne s’endettèrent également et totalement lors de la 2GM, au plus grand bonheur des USA. Les stocks d'or passant d'une rive de l'Atlantique à l'autre...
D'ailleurs, vider les caisses de l'Etat est une spécialité bien connue des Francs/Français. Que la Bretagne ait eu un travers momentané est possible, quel pays n'a pas un jours dérapé sur ce sujet, mais il ne faudrait pas tomber dans la généralisation surtout face à la France.
Par ailleurs et par la suite, la France s'est très largement servi dans les caisses de l'Etat Breton au-travers du "Don gratuit", et ce n'est pas ce bon "Roy Soleil" qui ruina la France qui fut le dernier à venir se renflouer en Bretagne...
Comme quoi, même si la Bretagne avait une dette souveraine au 15ème siècle, elle a pu restée un porte monnaie ouvert pour le voisin dans les siècles suivants!
Et ce servir dans les caisses de l'Etat Breton se fera jusqu'à la Révolution où l'Etat Français finira par annexer directement ce dernier prenant au passage le contrôle sur le PIB Breton.
(On parle aujourd'hui de 30 milliards d'Euro qui quitte chaque année la Bretagne sans jamais y revenir... Alors que les Catalans veulent l'indépendance du fait de la moitié de cette somme...)
Par ailleurs, prétendre que la Marine Bretonne aurait pu résister aux armées françaises et comparer cela à la Royal Navy face à l'invincible Armada est un peu surprenant!
Pour prendre une flotte, il y a 2 techniques : Soit on coule les bateaux soit on prend leur port base par la terre.
C'est cette dernière méthode qu'utilisa l'Armée Allemande avec la Flotte Française à Toulon. La 4ème flotte mondiale perdue, sans un seul coup de canon...
Alors, si les canons des navires de 1942 ne pouvait pas arrêter une armée terrestre, imaginer que les canons de marine de 1488 auraient pu le faire est douteux! A moins de mettre des roulettes à la Cordelière et au reste de la flotte, façon Drakkar, mais bon...!
Je considère moi aussi et à l'évidence qu'une flotte ne peut remplacer une armée de terre sauf à ce que cette même flotte débarque une quantité certaine de soldats de métier... L'argument semble donc bien léger ( ou bien a propos ) par rapport à ce qu'avance L Melenec relativement à la contention exercée sur le parlement de vannes au moment du prétendu " traité de 1532" : "...Au moment des faits, la ville est entourée par la Cour de François Ier (10 000 à 14 000 hommes), venu sur les lieux avec son armée. L'armée bretonne, elle, n'existe plus: la Bretagne est totalement à la merci des Français..."
Il me semble que le compte n'y est pas entre une armée qui n'existe plus et une armée qui "attendrait de débarquer".
Il y a peut-être un peu de ménage à faire parmi les historiens...
Quand on fait de la politique il n'y a aucun problème à l'utilisation des arguments historiques .Par contre l'histoire et la politique ne font pas bon ménage ,c'est aussi difficile d'être objectif que de rechercher une aiguille dans une botte de foin .Et peut être pire quand il s'agit des enjeux Bretagne France ,le débat est très passionné ,voir par exemple le traité de mouvance de la Bretagne .De part sa situation géographique la péninsule était et est dans une position stratégique et convoitée .A travers l'histoire différentes puissances en ont été conscientes.... et pas seulement la France
Le traité d'Etaples fut un échange entre la France et l'Angleterre, afin que:
1- Le roi Henri VII n'ai plus de rival dangereux pour succéder à son trône (rival alors soutenu par la France)
Pour cela arrêt des attaques anglaises en France (Bourgogne apparemment) et reconnaissance de la victoire française sur la Bretagne, En contrepartie la France ne soutint plus le rival et versa une ENORME somme d'argent. Cela signifie que L'Angleterre dût perdre l'Alliance avec la Bretagne pour que son roi se maintienne au pouvoir
2-La France n'ai plus l'Angleterre comme ennemi à cause de l'alliance toujours valide. D'autant plus que les liens familiaux des familles ducales bretonnes furent tels qu'à un moment ou un autre un souverain anglais aurait pu avoir une légitimité à succéder au trône de Bretagne
Ensuite la France fit de même avec la Castille (Traité de Barcelone Janv.1493) en donnant le Roussillon entra autre + une importante somme d'argent.
Et rebelotte avec le Saint Empire.
Ceci dit, il est vrai que si la Bretagne ne fût alors pas endettée, ils n'auraient eu aucun intérêt à traiter avec la France.
Mais il ne s'agit pas d'un simple rachat de dette par la France qui permit de la conquérir. C'est un raccourci tellement simple que cela en devient faux.
L'alliance créée par la Bretagne (ce qui prouve l'importance de la Bretagne à cette époque) au final ruina la France (les caisses furent vides après ces traités) et elle perdit 30% de son territoire.
"Petite" suite: Après ces évènements, Charles VIII parti conquérir la Lombardie, et il ne me semble pas que cela fut un hasard: il fallait alors se refaire une santé financière et territorial (Légitimé par le fait que le roi fut aussi duc d'Anjou et donc prétendant à couronne de Naples), en conquérant un royaume riche. Aurait-il put attaquer une autre zone d'Europe? non; pas le sud de l'autre coté des pyrénées (Castille), pas l'est (Le saint Empire) et ni le nord ouest (Angleterre). Seule possibilité, la zone italique, loin des influences castillane, germaine et anglaise.
Revenant de ses conquêtes italiques il apporta des oeuvres d'art à Anne, esthète en la matière. Tombée amoureuse de cet art italique, elle fit venir Architectes (Château de Blois), peintres, sculpteurs, etc, et le diffusa dans toute l'Europe par le prestige de la couronne de France. Cet exportation des frontières italiques de l'art italien par Anne fût l'avènement de ce que l'on nomme: la Renaissance...
.persee.fr/doc/abpo_0399-0826_1975_num_82_4_2792
Mais on peut comprendre que des historiens aristocrates ou ecclésiastiques peuvent aussi avoir du mal à remettre en cause la noblesse ou le clergé,La Borderie lui par exemple a critiqué les insurgés de 1675 ,tout comme le chanoine Moreau lors des révoltes 1488 1490.Oui en ce qui concerne les anglais ,j'ai lu cela également,mais apparemment les espagnols ont réprimés aussi les révoltés à la même période du coté de Kemper .
Vu que la messe était quasiment dite en ce qui concerne l'indépendance bretonne ,les pouvoirs ont t-ils craint une insurrection populaire nationale ,et sociale remettant en cause l'ordre établi ,avec une possible contagion ??? C'est ce qui s'est passé en Normandie dans les années 1640 il me semble ,donc pourtant bien longtemps après que ce duché a perdu son indépendance .En fait selon le droit international il est toujours potentiellement indépendant aussi par rapport aux iles anglo normandes
voir l'article et surtout le commentaire en dessous de celui ci
histoirenormande.fr/combattre-la-crise-en-normandie-il-300-ans