
Diwan bientôt aura 50 ans !
Réalisation : ABP – 199 vues
Dans cette interview exclusive accordée à ABP, la présidente de Diwan Anne-Sophie Brats et la vice-présidente Adriana Fay reviennent sur les enjeux de la rentrée. Elles expliquent pourquoi l’ouverture du collège de La Bouëxière est qualifiée d’« historique », et détaillent les défis financiers persistants liés au forfait scolaire et à la loi Molac. Elles insistent aussi sur l’importance que les adultes apprennent le breton pour que la langue ne reste pas cantonnée à l’école. Un échange franc et dense qui éclaire la stratégie de Diwan à l’approche de ses 50 ans en 2027.
Diwan ouvre deux nouvelles écoles et son premier collège en Ille-et-Vilaine à la rentrée 2025, malgré une baisse légère des effectifs. Mais le non-paiement du forfait scolaire par certaines communes prive encore le réseau de 250 000 € chaque année.
Un nouveau bureau à la tête de Diwan
Depuis juin 2025, la Fédération Diwan est présidée par Anne-Sophie Brats, élue lors du dernier congrès. À ses côtés, Adriana Fay, vice-présidente en charge du 1er et 2nd degré, Séverine Inkerman, vice-présidente finances, Mathilde Lahogue, directrice générale depuis novembre 2024, et Soaz Plantec-Rouzic, responsable du secondaire. Ensemble, elles affichent une volonté claire : consolider le réseau, professionnaliser son fonctionnement et garantir sa pérennité.
Des ouvertures marquantes
Malgré une baisse globale des effectifs (3 712 élèves à la rentrée 2025, contre 3 917 l'an dernier), trois établissements ouvrent :
- une école à Tréguier (Côtes-d'Armor)
- une école à Orvault (Loire-Atlantique), dont l'ouverture effective est reportée à janvier 2026 pour raisons de sécurité,
- et surtout le premier collège Diwan d'Ille-et-Vilaine, à La Bouëxière, près de Liffré.
Ce dernier est qualifié " d'historique " : fruit de quinze ans de mobilisation locale, il accueille dès cette rentrée une dizaine d'élèves, presque tous internes, dans des locaux provisoires. Il répond à une attente forte des familles de Rennes, Dinan, Fougères et Guipel, qui se retrouvaient jusqu'ici contraintes d'envoyer leurs enfants à plusieurs heures de transport.
Vers un maillage territorial renforcé
Pour Diwan, l'enjeu est clair : " proposer un collège à moins d'une heure du domicile des familles ". L'ouverture de La Bouëxière répond à cette exigence. Le réseau compte désormais 47 écoles (48 en janvier), 7 collèges et 2 lycées. Cette dynamique s'appuie à la fois sur l'engagement bénévole des comités de soutien et sur une professionnalisation accrue des services de la fédération, qui s'est dotée d'un comité de direction et de nouveaux postes d'accompagnement pédagogique.
Une situation financière fragile mais stabilisée
La crise de 2024, marquée par un déficit de 500 000 €, a été surmontée grâce aux dons (140 000 €), à l'aide de la Région Bretagne (200 000 €), des départements du Finistère et du Morbihan (50 000 € chacun) et à une dizaine de communes. Le budget 2025 atteint 6,3 millions d'euros. " Nous ne parlons pas d'économies, mais d'équilibre ", insiste Séverine Inkerman. Des solutions ont été trouvées, comme l'accès aux tarifs négociés de Morbihan Énergie pour réduire la facture énergétique. Par ailleurs, la loi Molac (2021) oblige les municipalités ne disposant pas d'une école bilingue sur leur territoire à verser le forfait scolaire pour les enfants scolarisés hors commune dans un établissement en langue régionale ; or de nombreuses communes ne paient toujours pas, ce qui représenterait un manque à gagner d'environ 250 000 € selon Anne-Sophie Brats. Des démarches sont en cours auprès des préfectures pour faire appliquer la loi.
Le combat pour un statut public adapté
Au cœur du discours, une revendication ancienne : la création d'un statut public adapté pour les écoles immersives. Actuellement assimilées à l'enseignement privé, les écoles Diwan supportent des loyers et charges qui pèsent lourdement. " Si nous pouvions bénéficier de bâtiments mis à disposition, notre équilibre financier serait bien plus solide ", souligne la présidente. La fédération a relancé une commission interne sur ce sujet, et espère l'appui de parlementaires pour une proposition de loi.
La loi Molac : des avancées incomplètes
Si la loi Molac (2021) a permis de réduire les manques à gagner liés aux forfaits scolaires, certains maires refusent encore d'appliquer la règle. Le préjudice est évalué à 250 000 €. Plusieurs recours sont en cours auprès des préfectures. " Nos enfants ne sont pas des citoyens de seconde classe ", martèle Adriana Fay, rappelant que ces forfaits financent directement les emplois qui accompagnent les élèves.
Inclusion et égalité des chances
Diwan se veut ouvert à tous, y compris aux enfants en situation de handicap ou issus de milieux modestes. Le taux de boursiers dans certains collèges atteint 30 %, au-dessus de la moyenne académique. Le réseau revendique aussi une pédagogie favorable aux élèves dyslexiques, grâce à la régularité phonétique du breton. Mais il appelle l'État à prendre ses responsabilités pour financer davantage d'AESH (accompagnants d'élèves en situation de handicap) bretonnants.
" Le breton ne doit pas rester la langue de l'école "
Dans l'interview accordée à ABP, Anne-Sophie Brats insiste sur la nécessité que les adultes s'approprient aussi la langue. Elle invite les parents et citoyens à suivre des cours de breton pour en faire une " langue de vie " et non seulement une langue scolaire. Elle fixe un cap symbolique : 50 écoles primaires pour les 50 ans de Diwan en 2027.
Conclusion
Avec de nouvelles ouvertures, une gouvernance renouvelée et un engagement affirmé pour la reconnaissance institutionnelle, Diwan montre qu'il reste un acteur incontournable de l'avenir du breton. Mais la pérennité du réseau dépendra de la résolution de ses fragilités financières et de l'obtention d'un véritable statut public adapté. Voir la vidéo intégrale de la conférence de presse qui a eu lieu à Brest le 8 septembre.
Commentaires (1)
Mais il est vrai que c'était une grosse anomalie car la demande était très forte. La preuve : une dizaine d'élèves sont attendus dans ce collège. Ce qui fait en moyenne donc 2-3 élèves par niveaux (de la 6ème à la 3ème) !
Le lieu choisi est particulièrement central : La Bouexière, son métro, ses voies express, son train. Et surtout au coeur d'une zone du département particulièrement marquée par la langue bretonne entre Liffré, Champeaux et Saint-Didier. La priorité des priorités donc.