"Toutes les photos de ce livre ont été prises dans le respect des animaux et de leur environnement, sans causer de dérangement. Cette démarche photographique s’inscrit dans la volonté de préservation de la biodiversité, essentielle dans notre travail et notre quotidien. "
La photo :  Manchots royaux (Aptenodytes patagonicus) ©Nolwenn Trividic
"Toutes les photos de ce livre ont été prises dans le respect des animaux et de leur environnement, sans causer de dérangement. Cette démarche photographique s’inscrit dans la volonté de préservation de la biodiversité, essentielle dans notre travail et notre quotidien. " La photo : Manchots royaux (Aptenodytes patagonicus) ©Nolwenn Trividic

L'archipel Crozet, découvert en 1772 par le navigateur breton Julien Marie Crozet, est l'un des territoires les plus isolés de la planète. C'est dans cet autre penn ar bed, que deux jeunes scientifiques originaires de Bretagne, Nolwenn Trividic et Élodie Paciello, ont vécu quinze mois d'hivernage. Leur livre Presque seules en terres australes, paraît demain aux éditions Maisonneuve & Larose, restitue cette expérience unique entre recherche scientifique et aventure...

L’archipel Crozet porte le nom d’un navigateur breton, Julien Marie Crozet, né le 26 novembre 1728 à Port-Louis et mort en 1784. Aux côtés de Marc-Joseph Marion du Fresne, il prit possession de l’archipel en 1772 au nom du royaume de France. Quelques années plus tard, en 1776, sans y naviguer, le capitaine britannique James Cook décida de baptiser ces terres du nom de leurs deux découvreurs, îles Marion et Crozet. Finalement, seul le nom de Crozet est resté.

C’est dans ce décor de bout du monde que deux jeunes biologistes bretonnes, Nolwenn Trividic (photographe) et Élodie Paciello (auteure des textes), ont passé quinze mois d’hivernage au milieu des manchots, gorfous macaroni, albatros, otaries, éléphants de mer et pétrels. Elles racontent une immersion à la fois scientifique et sauvage.

Entre science et aventure

Le récit mêle journal de terrain et regards intimes. On y découvre la vie des hivernants sur la base Alfred Faure : le départ à bord du Marion Dufresne, l’arrivée dans la Baie du Marin, la cohabitation dans une micro-société de vingt-sept personnes, les règles strictes du quotidien, mais aussi les petits rituels qui permettent de préserver l’équilibre collectif.

Élodie Paciello raconte son travail de « manchologue » : suivi des colonies de manchots royaux, capture et pose de transpondeurs, observation des comportements. Les lecteurs entrent ainsi dans les coulisses de la recherche scientifique menée par l’Institut polaire français Paul-Émile Victor. Nolwenn Trividic, elle, livre une galerie de photographies saisissantes, des paysages de mousses multicolores aux colonies immenses d’albatros et de manchots, jusqu’aux orques surgissant dans la baie.

L’émerveillement et l’épreuve

Ce qui frappe dans le récit, c’est l’alternance entre émerveillement et rudesse.
La beauté des levers de soleil sur l’île de l’Est, les jeux des poussins de manchots ou les aurores australes contrastent avec la fatigue des longues marches sous la pluie, l’isolement extrême, la rigueur des manipulations scientifiques et les tensions inévitables de la vie communautaire.

Les deux autrices restituent avec finesse la fragilité de cet écosystème unique, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, et l’importance de protéger ces sanctuaires de biodiversité.

Une expérience universelle

Au-delà du témoignage scientifique, Presque seules en terres australes est aussi une méditation sur le temps et l’essentiel.
Le rythme des saisons, la lenteur des journées d’hiver, l’apprentissage de la simplicité et de la solidarité rappellent combien ces expériences aux confins du monde nous éclairent sur notre rapport à la nature et à nous-mêmes.

« Nous sommes désormais presque seules sur notre petit caillou pour les cinq mois à venir. La majorité de la faune, venue s’y reproduire l’été, a déserté l’île. L’hiver est là. Comme les oiseaux, notre activité est intense durant l’été austral et ralentie pendant l’hiver. Nous apprenons une nouvelle façon de vivre, plus lente, plus simple. »

En conclusion

Ce livre est à la fois carnet de voyage, reportage scientifique et récit d’aventure humaine.
À travers leurs mots et leurs images, Nolwenn Trividic et Élodie Paciello invitent le lecteur à partager leur hivernage : un huis clos au milieu de l’océan Indien, où l’on apprend que vivre « presque seules » au bout du monde, c’est habiter autrement la Terre.